Tuesday, February 15, 2011

Vorhandenheit ?!



Dans ce livre, je mobilise un concept, et même deux, empruntés à un philosophe allemand mort avant la naissance d'Internet, hostile à la technique en général, et qui plus est controversé pour son attitude à l'égard du régime nazi : Martin Heidegger (image). Compte tenu de ce qui précède, quel intérêt ? Pas plus qu'on ne peut réduire l'oeuvre de Céline à ses pamphlets antisémites, on ne peut disqualifier la totalité de l'oeuvre monumentale de Heidegger au motif de son engagement politique — sur lequel il n'est d'ailleurs jamais revenu. Mobiliser ces concepts me semble se justifier parce que nous devons adapter notre système de références à l'évolution de notre réalité. La thèse que je défends dans le livre est celle d'un élargissement de notre réalité aux dimensions des univers informatifs sans confins qu'Internet place au creux de notre paume. Toutefois cette "réalité" ne peut être assimilée purement et simplement à la lampe de bureau que j'ai en face de moi, ce serait simpliste. D'où l'intérêt du couple Vorhandenheit/Zuhandenheit. Par Vorhandenheit, Heidegger désigne la disponibilité; la Zuhandenheit désigne l'utilisabilité. Qu'un homme pénètre dans son garage, il trouve face à lui une foule d'objets présents (Vorhandenheit), toutefois seul le marteau l'intéresse pour planter un clou dans son séjour (Zuhandenheit). De même Internet nous offre-t-il l'accès immédiat à des infinités (Vorhandenheit), auxquelles nous n'accédons que par le biais de ce qui nous est utile (Zuhandenheit). Mon point est que le monde de ce qui nous est disponible et présent dans la réalité virtuelle surclasse largement ce qui nous est utile, tout en nous restant authentiquement présent, et que ces deux niveaux de réalité ne sont pas du même genre. D'où la nécessité de les désigner par deux concepts différents — et c'est le couple conceptuel heideggérien qui me paraît le mieux à même d'y pourvoir !

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